La consultation pour la désignation de la prochaine rectrice ou du prochain recteur s’est déroulée du 14 au 30 mars. Parmi les candidatures déposées, le comité de sélection a retenu trois personnes provenant de l’École des sciences de la gestion : Lisa Baillargeon, François Audet et Stéphane Pallage. Le comité exécutif du SPPEUQAM a rencontré le comité de sélection le 29 mars pour lui présenter ses attentes envers la personne qui occupera le rectorat, un poste d’une importance capitale.
Nous avons tout d’abord dénoncé la faible représentativité des chargées, chargés de cours dans le processus de désignation au rectorat : les 51 membres du SPPEUQAM consultées représentent 3,9% des personnes consultées, alors que nous représentons 39,4% de l’ensemble des employés de l’UQAM. Le président du comité de sélection et président du Conseil d’administration de l’UQAM nous a répondu que le Règlement no. 3 des procédures de désignation serait révisé après le processus de désignation actuel. C’est une bonne nouvelle et nous serons très vigilants pour que les modifications résultent en une meilleure représentation collégiale pour nous et la communauté.
L’exécutif a aussi questionné le comité de sélection sur le fait que certaines personnes qui ont déposé un dossier de candidature n’ont pas été retenues par le comité de sélection. Les rumeurs suggéraient qu’au moins une dizaine de personnes avaient déposé un dossier de candidature. Le comité de sélection a toute latitude pour faire son choix parmi ses candidatures et de décider lesquelles seront envoyées à la consultation publique. Le processus de sélection nous semble donc cruellement manquer de transparence et pourrait être plus démocratique.
Concernant les trois personnes retenues, elles ont présenté chacune un programme intéressant et semblent avoir à cœur le bien de notre université.
Nous avons exprimé au comité de sélection les enjeux suivants qui nous semble cruciaux pour le rectorat.
Baisse des effectifs étudiants et développement académique
Le comité exécutif du SPPEUQAM est très inquiet de la baisse des effectifs étudiants et de l’impact sur le fonctionnement de notre université. D’autant plus, que les premières personnes impactées seront les chargées, chargés de cours. Nous avons aussi appris que de nombreuses demandes d’admission ne sont pas traitées par le registrariat depuis plusieurs mois. Il y a ici une situation inacceptable! On voit ainsi les impacts d’une vision budgétaire à court terme en coupant dans le personnel et les services. Cela accentue la baisse d’inscriptions, les étudiantes et étudiants vont aller s’inscrire ailleurs. Nous avons donc besoin d’une personne au rectorat qui a une vision à long terme et qui comprenne que couper un cours n’est pas seulement une opération budgétaire. Pour prendre en main ce dossier, nous avons besoin d’une personne au rectorat qui va agir immédiatement! Évidemment, tout en consultant, mais sans rentrer dans une spirale de consultations sans fin.
Relations avec la communauté
Les dernières années ont été difficiles avec la direction de l’UQAM. L’ancienne rectrice avait créé des groupes de travail avec des statuts opaques, qui ne relevaient pas des instances et dont la composition ne passait pas par leurs groupes représentatifs (syndicats et associations), ce qui a mis à mal la confiance avec la communauté. L’UQAM a besoin d’une personne au rectorat qui comprennent les dynamiques internes et qui sache comment dialoguer avec les syndicats et les associations. Dans la dernière ronde de négociations, il semble que la direction a poussé les syndicats à la grève.
Le SPPEUQAM va entrer dans une nouvelle phase de négociation lors de la réouverture de sa convention collective sur l’enseignement en ligne. L’UQAM ne pourra pas développer une offre de cours en ligne de qualité sans s’entendre avec nous sur les conditions de travail liées à ce type d’enseignement. Est-ce que l’UQAM va réellement négocier de bonne foi dans le calendrier établi? Si l’UQAM ne joue pas le jeu, nous exercerons notre droit de grève!
Plus globalement, nous avons besoin d’une personne qui exercera un véritable leadership auprès du ministère de l’Enseignement supérieur et du Bureau de coopération interuniversitaire tout en déployant les efforts requis pour faire rayonner l’UQAM aux plans national, international et local.
Budgets et finances
La conjoncture politique est actuellement favorable à l’UQAM. Pendant que l’Université Laval fait les manchettes avec la grève de ses professeures et professeurs, nous pourrions en profiter pour redorer l’image de l’UQAM. L’article paru dans La Presse du 23 mars dénonçant que les universités anglophones se partagent 60% du financement des infrastructures et que les composantes de l’UQ « obtiennent 5% de la tarte » est une opportunité politique pour aller réclamer notre juste part auprès du gouvernement qui est plutôt francophile! Le président du réseau de l’Université du Québec doit être sensible à ce sujet… En attendant, nous n’avons personne à l’UQAM actuellement pour saisir cette opportunité, soit une personne forte qui va pouvoir défendre la place de l’UQAM immédiatement!
Quand on lit que les investissements en infrastructures du Québec correspondent à 28 500$ par étudiant de McGill et à 357$ par étudiant de l’UQAM, on a de quoi être estomaqué, voire révolté, d’autant plus que la formule de financement ne sera plus favorable à l’UQAM en 2024. C’est maintenant que le rectorat doit négocier des enveloppes budgétaires pour la mission de l’UQAM, à titre de grande université francophone du centre-ville de Montréal!
La compétition entre les universités nous entraîne vers des aberrations qui nuisent à l’UQAM. Le gouvernement devrait arrêter de favoriser cette compétition malsaine et plutôt réinvestir dans l’enseignement supérieur.
Collégialité participative
Pour tout ce qui concerne l’académique, l’UQAM se prive d’une expertise importante de ces 2 494 personnes chargées de cours en ne les intégrant pas assez aux prises de décisions. Consulter les unités académiques est une bonne chose, mais il ne faut pas oublier que les chargées, chargés de cours sont très peu représentés alors qu’elles et ils donnent près de 60% des cours au 1er cycle. Nous peinons à être présents aux assemblées départementales et nous n’avons toujours pas le droit de vote. Une collégialité participative nous permettra de proposer des solutions innovantes en enseignement dans nos domaines respectifs.
Les chargées, chargés de cours doivent être véritablement associées au développement de l’UQAM et cela passe indéniablement par une collégialité participative. Nous devons ainsi être partie prenante des grandes orientations et décisions de l’UQAM. Nous voulons une véritable reconnaissance de la contribution des chargées et chargés de cours au recrutement et à la réussite étudiante. Il importe également que les personnes chargées de cours qui font de la recherche et de la recherche-création puissent être mieux soutenues par l’UQAM. Tout cela passe notamment par une sérieuse réflexion sur notre statut précaire.
Commentaires sur les trois personnes candidates
Madame Baillargeon
Ses explications quant à ses potentiels conflits d’intérêts avec Desjardins ne nous ont pas convaincu. Nous avons déjà un président du Conseil d’administration de l’UQAM qui travaille chez Desjardins. Nous rappelons notre désir de changer de compagnie d’assurance collective et cela nous semble plus difficile d’y parvenir si les plus hautes fonctions de l’université sont occupées par quelqu’un qui travaille pour l’entreprise que nous voulons quitter.
Monsieur Audet
Sur papier, monsieur Audet semble un candidat intéressant, avec un profil diversifié qui pourrait rassembler la communauté de l’UQAM. Cependant, l’expérience professionnelle du candidat ne semble pas en accord avec les besoins immédiats de l’UQAM. Il a également une vision très « spuqienne » de l’université et semble très mal connaître les instances de l’université tout en ne comprenant pas la réalité des chargées, chargés de cours. Il veut consulter, mais va-t-il être capable d’agir rapidement? Il nous fait penser à l’ancienne rectrice dont le bilan n’est pas très glorieux. Il pourrait être un bon candidat dans quelques années.
Monsieur Pallage
Il s’agit du candidat qui semble avoir la plus grande expérience et, comme il le répète, prêt à réaliser les fonctions de recteur dès son éventuelle entrée en fonction. Le déroulement de sa campagne nous a montré une personnalité « politicienne » qui serait possiblement un atout pour l’UQAM dans la conjoncture actuelle. Par contre, il veut poursuivre la décentralisation, ce qui nous inquiète beaucoup. Le SPPEUQAM avait d’ailleurs articulé une position ferme contre la décentralisation des ressources en 2016. Cette période a laissé des cicatrices encore très douloureuses. Est-ce qu’il pourrait être le recteur de l’UQAM et non le recteur de l’ESG?
Quoi qu’il en soit, nous espérons que l’UQAM aura une nouvelle rectrice ou un nouveau recteur le 31 mars. Recommencer une troisième « course » au rectorat serait une très mauvaise nouvelle pour l’institution. Mais au final, c’est le comité de sélection qui choisit les personnes retenues pour cette « consultation »…
Olivier Aubry, président