Défendre l’école, c’est défendre la démocratie


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Dans son essai percutant Why Fascists Fear Teachers, la présidente de l’American Federation of Teachers, Randi Weingarten, décortique la guerre culturelle qui vise l’école publique aux États-Unis. Mais le diagnostic dépasse largement les frontières américaines : il trouve un écho particulier au Québec, où les éducatrices et éducateurs ainsi que le personnel enseignant et celui du réseau public affrontent, eux aussi, les mêmes vents contraires. Why Fascists Fear Teachers s’ouvre comme une fable héroïque. En 1940, des enseignants norvégiens refusent de plier au régime nazi. Pour afficher leur unité, ils arborent discrètement un trombone sur le revers de leurs vestons ou de leurs chemises. Ce geste minuscule, répété des milliers de fois, devient un puissant symbole de résistance. Randi Weingarten en tire une leçon : les enseignantes et enseignants représentent une menace pour les régimes autoritaires, car ils apprennent aux gens à penser. Ce ne sont ni les multiplications ni la grammaire qui dérangent, mais bien l’éducation à la liberté, à la solidarité et à la pensée critique. La plume de Randi Weingarten est celle d’une syndicaliste aguerrie, d’une femme de terrain plutôt que d’une universitaire. Elle écrit comme on manifeste : avec urgence et conviction. Sa conviction, c’est que garder le silence face aux dérives autoritaires, c’est en devenir complice. Ce ton direct, parfois intense, est à la hauteur des enjeux qu’elle dénonce. On y retrouve d’ailleurs des arguments qui résonnent familièrement de ce côté-ci de la frontière : défendre l’éducation publique, c’est défendre un modèle de société. L’autrice parle d’un pays où la droite radicale multiplie les interdictions de livres, s’attaque aux programmes d’histoire critique et tente de détourner les fonds publics vers des écoles privées confessionnelles. Sous-financement, dévalorisation du personnel et privatisation des services sont autant d’échos à l’actualité récente ici même au Québec.