Chaque mardi, Le Devoir offre un espace aux artisans d’un périodique. Cette semaine, nous vous proposons un extrait d’un texte de la Revue d’histoire de l’Amérique française, vol. 78, no 1 (été 2024), qui vient tout juste de paraître. Un texte de la chargé de cours Camille Robert, historienne et chercheuse postdoctorale à l’Université Concordia. Au cours des années 1960 et 1970, le Québec connaît un important développement de son réseau public d’éducation, dans la foulée des travaux de la commission Parent (1961-1966) et de la création du ministère de l’Éducation (1964). Dans une volonté de modernisation et afin de répondre aux besoins en matière d’éducation, des réformes majeures sont entreprises en vue de démocratiser le réseau. La croissance du secteur de l’éducation mène à l’embauche massive d’enseignantes qui forment, de plus en plus, un corps professionnel laïque, scolarisé et syndiqué, socialement valorisé pour son rôle central dans les réformes en cours. Cette période est également ponctuée par d’importants conflits syndicaux, dont la grève de 1967 dans les écoles et les fronts communs de 1972, 1976 et 1979, qui ont procuré plusieurs gains au personnel du secteur public. Au cours des années 1980, dans la foulée d’une remise en question de l’État-providence, d’une récession économique majeure et d’une forte hausse du taux de chômage, les finalités humanistes de l’éducation sont progressivement mises de côté au profit, selon Wilfried Cordeau, « d’une longue discussion publique sur la qualité et l’efficacité du réseau ». Face à une crise des finances publiques, les coûts du système d’éducation, et particulièrement les salaires et la « productivité » des enseignantes, sont alors réévalués.